Contrairement à certaines idées reçues, la profusion d’écrans est loin d’améliorer les aptitudes des enfants.
Michel Desmurget , chercheur en neurosciences, présente la première synthèse des études statistiques internationales sur le sujet dans son ouvrage intitulé La fabrique du crétin digital (éditions du Seuil, 2019).
Ce que nous faisons subir à nos enfants est inexcusable…c’est une véritable entreprise de décérébration.
Son constat est imparable : l’utilisation si minime soit-elle des écrans récréatifs (jeux vidéo, ordinateur, télévision, smartphone) altère la construction mentale, le langage, la santé (qualité du sommeil, développement du système cardio-vasculaire, sédentarité), la concentration et donc les résultats scolaires.
Les impacts nuisibles sont mesurables dès 60 minutes d’usage journalier (dix à trente minutes chez le jeune enfant), des heures qui se substituent aux relations familiales, au travail scolaire, aux activités nourrissantes (lecture, sport, jeux…) et qui ne se rattraperont pas car elles sont prises sur les précieuses périodes de plasticité cérébrale propres à l’enfance et à l’adolescence.
45 études sur 150 000 enfants de moins de 18 ans montrent une corrélation positive entre la consommation numérique et le déficit attentionnel : une à trois heures quotidiennes passées devant les écrans récréatifs doublent ce déficit. La performance scolaire se dégrade nettement à proportion du temps passé sur le smartphone, la corrélation négative est nette entre le temps consacré aux écrans et le bien-être affectif et psychologique.
Par ailleurs, aucune étude ne démontre que l’enfant connecté serait plus rapide, créatif et collaboratif dans le travail comme cela avait pu être avancé.
Si l’outil numérique peut être un support d’apprentissage pertinent et une inépuisable source d’information, il doit être utilisé avec parcimonie. On constate en effet, chez la « digital native » (génération connectée) une difficulté à trier, organiser, synthétiser et assimiler les informations, une propension à la dispersion, une domination de la facilité sur l’effort et l’abrègement du temps dédié aux devoirs scolaires.
D’autre part, l’attention « distribuée » (ouverte aux sollicitations extérieures) requise pour les jeux vidéo, la consultation du smartphone et l’utilisation des réseaux sociaux perturbent l’attention « focalisée » (peu perméable aux pensée parasites) nécessaire au travail scolaire . Une étude récente montre que 2 à 5 secondes d’inattention suffisent à faire dérailler le flux réflexif et affecte donc la productivité cognitive. Or, avec le smartphone , ce sont 50 à 150 interruptions par jour entre sollicitations externes (SMS, appels …) et consultation compulsive !
Sur la dernière décennie, l’utilisation des écrans récréatifs chez les jeunes a augmenté de 30% : c’est une véritable orgie digitale qui altère également la santé et notamment le sommeil. Or, de sa qualité dépend la stabilisation des apprentissages, l’intégrité physique, émotionnelle et intellectuelle.
Une étude récente a montré également un lien entre une hypertrophie de l’hippocampe (pathologie constatée dans les maladies neuro dégénératives) et la fréquentation assidue des jeux vidéo.
Or, pour rassurer et déculpabiliser les parents, les analyses ne montrent aucun préjudice chez les enfants privés d’écrans récréatifs : ni trouble émotionnel, ni isolement social. Le choix semble clair : à partir de 6 ans, il ne s’agit pas d’interdire mais de s’assurer que le temps d’usage est impérativement maintenu sous le seuil de nocivité.
Et l’auteur de conclure : Lorsque vos enfants seront grands, ils vous remercieront d’avoir offert à leur existence la fertilité libératrice du sport, de la pensée et de la culture, plutôt que la stérilité pernicieuse des écrans … moins d’écran, c’est plus de vie !